La 4e édition de sa Soirée d’éloquence, organisée par l’ASBL Congo culture sera célébrée le 30 juin, le choix a été porté sur Patrice Émery Lumumba. La soirée coïncide avec l’actualité avec le retour de la relique du Héros national congolais. Entretien avec Maitre Jacques Mukonga, président de l’ASBL et parti de l’accusation au procès.
Après Tshombe, Mobutu et Léopold II, quelle sera la particularité du procès Lumumba ?
C’est une actualité aujourd’hui. Lumumba revient au-devant de la scène. Le 30 juin, le convoi sera à Lubumbashi, une belle coïncidence. Cela suscite de l’intérêt parce que c’est une occasion de reparler de Héros national, à notre manière.
Est-ce une coïncidence ou c’était calculé d’avance ?
Nous étions attentifs à l’actualité, mais il y a aussi le besoin de faire un gros plan sur le personnage de Lumumba, une première. Nous avons fait le tour parallèle Lumumba-Tshombe à l’époque pour comparer les personnages. On avait joué Tshombe et pas encore Lumumba. Les jeunes, qui visionnent nos précédentes éditions sur internet, ont besoin d’avoir ces éléments de culture, un personnage si important.
Le tribunal de l’Histoire, qu’est-ce ?
C’est une instance mentale et artistique ancrée dans la réalité. Le contradictoire est pour nous un principe central, c’est-à-dire qu’il ne faut toujours pas se contenter d’une seule vérité. Il faut entendre toutes les parties qui s’affrontent de manière agonique pour permettre à chacun de se forger sa conviction.
Vous dites qu’il s’agit d’un procès dialectique et non politique. Pourtant, les personnages choisis jusque-là ont un caractère politique prononcé : Mobutu, Tshombe, Léopold II et Lumumba. Comment expliquez-vous cette affirmation ?
Les personnages politiques peuvent être analysés à froid, de manière tout à fait intellectuelle, sans être dans les passions du moment. C’est ça la démarcation, il ne s’agit pas pour nous de dire qu’à ceux qui sont aujourd’hui au pouvoir sont « pour » ou « contre » Lumumba. Il s’agit d’être le moins possible dans l’actualité, tout en tirant les leçons du passé. Nous évitons les manipulations, c’est-à-dire qu’il ne faut pas que l’on se serve de cette instance qui est purement intellectuelle, académique pour en faire une tribune politique où l’on traite des questions actuelles.
Comment vous y prenez-vous atteindre votre public ?
Ce que nous produisons est à même temps utilisé par les jeunes, des étudiants de droit ou en lettres, comme un matériel didactique parce que ce sont des joutes oratoires avec des éléments de culture et d’éloquence. Nous ne faisons pas nos procès à partir de rien, mais c’est vraiment rendre la bibliothèque vivante dans l’oral. Si je veux faire l’accusation de Lumumba, je dois suffisamment lire les auteurs qui ont critiqué la portée de son action et mon « adversaire » fera le contraire. En fin de compte, les jeunes rentrent dans ce rythme et cela suscite une certaine émulation parce qu’on veut s’identifier, s’exprimer, être comme… Voilà ce qui intéresse les jeunes. L’impact est observable aujourd’hui avec les créations d’autres concours par des structures culturelles ou des institutions universitaires.
Quel regard portez-vous sur les précédentes éditions de la Soirée d’éloquence ?
Nous n’allons pas nous limiter aux politiques. J’avais déjà pensé à cette édition d’aborder le cas Yves Mudimbe (écrivain congolais, NDLR). Est-ce que les Congolais connaissent ses intellectuels ? Parfois, on a l’impression qu’il y a une rupture. Est-ce qu’on peut faire le procès de Mudimbe pour ses écrits, ses pensées, discuter de ces enseignements, c’est là que nous nous dirigeons, les procès des intellectuels.
Un mot sur Congo Culture qui lance de plus en plus des initiatives pour l’expansion de la culture dans les périphériques de la ville ?
Congo Culture sensibilise les jeunes à la lecture. Le constat est tel que nous ne lisons pas assez, les jeunes lisent moins en moins. J’ai pensé, avec d’autres jeunes, à créer cette association qui fait humblement de la sensibilisation en n’étant pas nécessairement dans l’approvisionnement ou l’importation des livres. Nous sommes là pour dire aux jeunes qu’il faut lire. Nos acquis en nombre de livres à notre siège permettent aux de passer par là pour lire et passer un moment agréable.
Un dernier mot sur le procès de Lumumba ?
Il y aura de grandes surprises. Les grands intellectuels, d’ici et d’ailleurs, nous ont fait confiance et ont accepté de venir, en l’occurrence Maitre Rémy qui vient de Kinshasa, est un grand avocat et écrivain connu de ses livres dans le domaine de Droit, M. Passy, le Professeur Biruru, etc. C’est intéressant parce que ça fait longtemps que nous n’avons pas vu les grands jouer et là, ils vont être dans un rôle.
Iragi Elisha
